Pour les bénéficiaires du RSA, l’année commence très mal. Depuis le 1er janvier, leur inscription à France Travail est automatique. Auparavant, seuls 40 % d’entre eux y étaient inscrits. Cela représente l’ajout de 1,3 million de personnes dans les tuyaux de France Travail et des organismes de suivi (Cap emploi, mission locale, département, etc.), alors que toutes ces structures sont déjà en manque de moyens et de personnels.

« Activités » obligatoires

Chaque allocataire devra signer un « Contrat d’engagement » – comme c’est le cas désormais pour tous les demandeurs d’emploi – qui prévoit la réalisation de 15 à 20 heures d’activités hebdomadaires, sur le modèle du Contrat d’Engagement Jeune.Le texte est (volontairement) flou sur le type d’activités qui entre dans le périmètre de la loi. L’exécutif prétend qu’il n’est pas question de faire travailler gratuitement les allocataires du RSA et qu’il ne s’agit que de recherche d’emploi, de formation, d’immersion professionnelle et d’accompagnement. Mais qui peut le croire ? Après tout, chaque année, le secteur privé exploite des centaines de milliers de stagiaires plus ou moins gratuitement, tandis que les services publics et les associations engagent des « volontaires » en service civique pour une bouchée de pain. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Fin 2023, lors de l’expérimentation du dispositif dans une commune de l’Eure, quatre allocataires du RSA s’étaient par exemple vus proposer d’effectuer un travail bénévole qui consistait à remettre en état le cimetière communal.

Contrôles et sanctions

France Travail persiste à affirmer qu’il n’y aura pas de suspension du versement de l’allocation en cas de non-réalisation de ces heures d’activité. Mais le décret d’application de la loi (dont la publication est prévue au cours du premier semestre 2025) prévoit bien des sanctions – dont la baisse et la suspension du RSA – qui sont laissées à la discrétion du président du conseil départemental.

Ces dernières années, les contrôles ont drastiquement augmenté chez France Travail, pour atteindre le chiffre de 600 000 en 2024. En conséquence, les radiations ont augmenté de 50 % entre 2021 et 2024. L’objectif est d’atteindre 1,5 million de contrôles en 2027. C’est la suppression du RSA pour de très nombreuses personnes qui se prépare ainsi.

Le rapport final d’évaluation de l’expérimentation du nouveau dispositif, publié en novembre par le ministère du Travail, estime que le coût moyen des nouvelles mesures « oscillerait entre 600 et 1200 euros par allocataire selon la modalité d’accompagnement» et peut grimper jusqu’à 4000 euros pour des publics rencontrant «des problématiques spécifiques».

Cette loi vise à rendre infernale la vie de l’ensemble des privés d’emploi, pour : 1) les forcer à accepter n’importe quel travail, notamment dans les secteurs « en tension », 2) faire des économies d’argent public. Mais un tel contrôle de tous les sans-emplois exige l’embauche massive de conseillers à l’emploi, ce qui implique une grande dépense d’argent public que l’Etat ne peut pas se permettre. Mécaniquement, la charge de travail des agents va donc drastiquement augmenter.

Le cas de la métropole de Lyon est intéressant puisqu’elle a obtenu des résultats similaires en termes d’insertion professionnelle (27 % d’accès à un emploi pérenne) sans imposer les heures d’activités. Cela montre que le véritable objectif des heures obligatoires est ailleurs, comme le montre le rapport : « La contrainte administrative de traçabilité des 15-20 heures est difficile à justifier et peut [...] conduire à renoncer au RSA ». Le Secours catholique constate en effet que le non-recours au RSA chez les personnes éligibles a augmenté de 10,8 % dans les zones qui ont expérimenté les nouvelles mesures, tandis qu’il n’augmentait que de 0,8 % ailleurs.

Des années de régression pour les sans-emplois

Depuis plusieurs années, l’exécutif mène la guerre à tous les sans-emplois. En 2021, la durée de travail minimale à temps plein pour ouvrir des droits au chômage est passée de 4 à 6 mois. Depuis le 1er janvier, l’allocation chômage est calculée sur une base fixe de 30 jours par mois, ce qui entraîne une perte moyenne de 5 jours d’indemnisation par an. Les gouvernements successifs ont prétendu que ces mesures visaient à atteindre le plein-emploi. Mais les mesures se succèdent, et le chômage ne baisse pas. Au contraire : il a stagné pendant 3 ans et repart désormais à la hausse.

La bourgeoisie veut faire croire que les sans-emplois le sont parce qu’ils ne recherchent pas de travail. Mais c’est ignorer le fait suivant : il n’y a pas de travail pour tout le monde ! Il y avait 520 000 emplois vacants au troisième trimestre 2024, tandis que le chiffre (officiel) de sans-emplois était de plus de 5 millions.

Le RSA constitue le dernier filet de secours avant de tomber dans l’extrême pauvreté. Conditionner son attribution, c’est mettre un couteau sous la gorge de tous ceux qui n’ont que cela pour survivre.

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