Samedi dernier (9 octobre) à Rome, des centaines de fascistes ont attaqué et saccagé le siège national de la CGIL (la Confédération Générale du Travail Italienne).

Cela s’est produit pendant une manifestation contre le « passe vert » (le passe sanitaire italien), rendu obligatoire sur les lieux de travail à partir du 15 octobre.

Cette mesure a déchaîné une vague de colère parmi les travailleurs (mais pas chez la majorité d’entre eux), et surtout parmi la petite-bourgeoisie et le lumpenprolétariat. Cette colère confuse a ouvert un certain espace politique pour la droite et l’extrême droite.

Les fascistes qui ont pris d’assaut le siège de la CGIL ont bénéficié d’une impunité totale de la part de la police, qui est restée l’arme au pied et les a regardés faire pendant un moment avant de finalement se décider à intervenir. La classe ouvrière a immédiatement réagi à cette provocation. Des milliers de personnes se sont rassemblés le lendemain devant les locaux de la CGIL partout en Italie, et une manifestation a été appelée pour le samedi 16 octobre à Rome. Elle promet d’être massive.

Une nouvelle phase d’intensification de la lutte des classes s’ouvre en Italie. Ci-dessous, la déclaration de nos camarades de Sinistra Classe Rivoluzione, la section italienne de la TMI, le 12 Octobre 2021 :

Les vidéos montrant les fascistes de Forza Nuova envahir le siège national de la CGIL et détruire tout ce qui se trouve à leur portée ne peuvent que susciter une profonde colère. Il s’agit d’une attaque délibérée contre le mouvement ouvrier et sa principale organisation.

Les fascistes passent leur misérable existence plongés dans une permanente hystérie raciste et homophobe. Les organisations ouvrières sont leurs principaux ennemis. Pour les fascistes, toute excuse est bonne quand il s’agit d’attaquer les travailleurs. C’est exactement ce qu’ils ont fait quand l’occasion s’est présentée samedi dernier. Celle-ci leur a été offerte par les mobilisations contre le passe sanitaire, qui est vu en Italie par beaucoup de travailleurs comme une mesure discriminatoire imposée par les patrons et par l’Etat.

La droite joue un rôle dans ces mobilisations. Sur les vidéos de l’attaque, on pouvait voir le dirigeant du mouvement anti-confinement IoApro (« J’ouvre ») parmi les assaillants du siège de la CGIL.

Nous devons apporter la réponse la plus forte, la plus ferme et la plus directe possible à cette attaque fasciste. Dimanche dernier, tous les locaux de la CGIL sont restés ouverts, et ont été occupés par des délégués syndicaux et des travailleurs. Une manifestation nationale contre le fascisme a été organisée et se tiendra le samedi 16 octobre.

Nous appelons à participer en masse à cette manifestation. Il faut faire la démonstration de la force de la classe ouvrière dans les rues. Ces organisations néo-fascistes vont pâlir de frayeur quand elles seront confrontées à toute la puissance de la classe ouvrière.

Les communiqués d’appel à la manifestation de samedi réclament la dissolution de toutes les organisations fascistes. C’est indiscutablement une mesure nécessaire, et nous y souscrivons entièrement. Néanmoins, nous ne devons nous faire aucune illusion sur la possibilité que le gouvernement de Mario Draghi et les « institutions démocratiques » ne démantèlent ces organisations – comme le croit le secrétaire général de la CGIL Maurizio Landini.

L’appareil de l’Etat ne connaît que trop bien les responsables de l’attaque de samedi et a, en fait, une longue histoire de collaboration avec l’extrême droite.

Roberto Fiore, le secrétaire national de Forza Nuova, a fui à l’étranger dans les années 1980 pour échapper à une condamnation pour appartenance à un groupe armé et n’est revenu en Italie qu’après la fin de la prescription.

Les dirigeants de Forza Nuova commettent régulièrement des attaques contre des migrants, des militants de gauche, etc. Ils continuent pourtant à agir en toute impunité – et tant pis pour la loi Mancino qui est supposée punir les crimes racistes.

Giuliano Castellino, le dirigeant de Forza Nuova à Rome, avait annoncé à l’avance que le siège de la CGIL serait une des principales cibles de la manifestation de samedi. Pourtant, alors que la ville était pleine à craquer de policiers, et que les bâtiments stratégiques étaient sévèrement gardés, le siège de la CGIL a été laissé sans protection policière.

Il est évident qu’aucune confiance ne doit être accordée à l’Etat pour régler le problème du fascisme.

Nous sommes maintenant les témoins d’un chœur de déclarations de solidarité et d’antifascisme de la part de Draghi, du patron de la Confindustria (le MEDEF italien) Carlo Bonomi et même de dirigeants de partis politiques de droite.

Pour autant, ce que craignent ces messieurs-dames, ce ne sont pas les fascistes, sur lesquels ils s’appuieront pour accomplir leurs sales besognes si le besoin s’en fait sentir. Ce qu’ils craignent réellement c’est que cet acte ne provoque une réaction des masses qui ne se contenterait pas d’écraser Forza Nuova, mais pourrait ensuite devenir une menace pour eux aussi.

Toutes les mesures qui pourraient être prises contre Forza Nuova (et aucune ne l’a encore été) ne viseront qu’à contenir la colère des masses. Elles ne régleront absolument rien.

Le Parti Démocratique (PD) essaie de tirer un profit politique de la colère des masses (il a en tête les prochaines élections qui approchent) en présentant au sénat une motion pour l’interdiction des organisations fascistes. Il ne voit par contre aucun problème à participer à l’actuel gouvernement d’union nationale aux côtés de partis ouvertement racistes.

Draghi a rendu visite en personne à Landini pour montrer sa solidarité. Mais les mesures qu’il a proposées reviennent en fait à une restriction générale du droit de manifester. Il est facile d’imaginer comment elles seront très vite utilisées contre les travailleurs d’Alitalia de GKN ou d’ailleurs qui perdront leurs emplois après la levée de mesures de restriction des licenciements le 31 octobre.

Bonomi a lui aussi offert sa solidarité à la CGIL. Il leur a demandé en même temps de continuer à soutenir le « pacte de croissance » : c’est-à-dire de s’abstenir de toute mobilisation, pendant que les patrons pressurent la classe ouvrière pour en extraire jusqu’à la dernière goutte de profit.

Cette « solidarité » offerte aux syndicats est en fait un calice empoisonné que nous devons renvoyer à l’expéditeur. Nous nous rappelons que les fascistes ont entamé leur ascension en attaquant les bourses du travail, nous devons aussi nous souvenir que jamais ils n’ont été vaincus par la collaboration de classes. La seule voie pour vaincre les fascistes se trouve dans la lutte de classe.

C’était le cas pendant la Résistance, et c’était à nouveau le cas lors de la grande grève générale de Gènes en 1960.

La force des syndicats repose dans ses adhérents, et dans les travailleurs qui les voient comme un point de référence dans la lutte pour la défense de leurs droits. Faire des courbettes devant la Cofindustria et le gouvernement Draghi ne fait qu’affaiblir la CGIL.

Aujourd’hui, des millions de travailleurs ont besoin d’un syndicat qui organise une riposte contre les politiques patronales, les licenciements, l’exploitation, la mortalité au travail, et les discriminations. La meilleure réponse à l’attaque fasciste de samedi est d’enfin lancer cette contre-offensive ouvrière, en commençant par une grève générale dirigée contre les fascistes, contre la Cofindustria, et contre le gouvernement Draghi.

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