Nous publions ci-dessous la troisième et dernière partie du Manifeste de la Tendance Marxiste Internationale (TMI) sur la révolution arabe.Pour l’essentiel, ce texte a été achevé le 14 mars dernier.

 

La révolution n’est pas terminée

La révolution a commencé ; elle n’est pas terminée. Sa victoire n’est pas garantie. C’est une lutte de forces vivantes. La révolution n’est pas une pièce en un acte. C’est un processus complexe avec de nombreux flux et reflux. Le renversement de Moubarak, Ben Ali et Ghannouchi marquent la fin de la toute première phase. Mais la révolution n’a pas encore réussi à complètement renverser le vieux régime – qui, de son côté, n’a pas encore réussi à reprendre le contrôle de la situation.

La révolution russe de 1917 a duré neuf mois, de février à octobre. Les travailleurs ont fini par prendre le pouvoir sous la direction du Parti Bolchevik. Cependant, la révolution russe n’était pas une ligne droite. Elle est passée par toutes sortes de vicissitudes et de contradictions. Il y eut une période de réaction ouverte en juillet et août. Lénine a dû fuir en Finlande. Le Parti Bolchevik était pratiquement illégalisé. Mais ce n’était que le prélude d’une nouvelle avancée de la révolution, qui a culminé dans l’insurrection d’octobre.

En Espagne, la chute de la monarchie, en 1931, a été suivie d’un intense développement de la lutte des classes. Puis la défaite de la Commune des Asturies, en octobre 1934, a mené à une période de réaction, les « deux années noires » de 1935-1936 (Biennio Negro). Mais ce n’était que le prélude d’une nouvelle phase de la révolution, avec la victoire du Front Populaire aux élections de 1936, puis la guerre civile – et finalement la défaite et le fascisme.

Les masses égyptiennes et tunisiennes se battent pour des revendications qu’aucun gouvernement bourgeois ne pourra satisfaire. Comme les travailleurs russes en 1917, les travailleurs d’Egypte et de Tunisie ont réussi à renverser des tyrans, mais ils n’ont pas atteint leur objectif central. La véritable lutte est à venir. Qu’est-ce qui a été résolu par la chute de Moubarak et de Ben Ali ? Rien de fondamental. Les travailleurs luttent pour du pain, des emplois, des logements – et non pour une parodie de démocratie bourgeoise dans laquelle tout change pour que rien ne change.

Les masses puisent de sérieuses leçons dans une douloureuse expérience. Tôt ou tard, elles en viendront à la conclusion que la classe ouvrière doit prendre le pouvoir. Un processus de différenciation se développera. Il a déjà commencé. Dans les comités révolutionnaires, les éléments les plus modérés, qui dirigeaient la première phase du mouvement, et qui ont des illusions dans l’armée, sont contestés par de nouvelles couches de jeunes et de travailleurs qui s’opposent au compromis. Ils craignent qu’on leur reprenne, au moyen de subterfuges, ce qu’ils ont conquis par leur sang. Et ces craintes sont parfaitement fondées.

Avec la chute de Moubarak, la révolution égyptienne a remporté sa première grande victoire. Mais aucun des problèmes fondamentaux de la société égyptienne n’a été résolu. Les prix continuent d’augmenter, des sans-abri dorment dans des cimetières et 10 % de la force de travail est toujours au chômage – officiellement, car c’est beaucoup plus en réalité.

Il y a une profonde colère contre les inégalités et la corruption généralisée qui est le trait dominant de l’ancien régime. Des milliards de dollars d’argent public font défaut. Les sommes pillées par la seule famille Moubarak sont estimées entre 40 et 80 milliards de dollars. Dans le même temps, 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Il est impossible de prévoir la suite des événements avec certitude et précision. Ce qui est certain, c’est que la révolution s’étendra sur une longue période et connaîtra toutes sortes de flux et de reflux. A ce stade, les masses sont grisées par l’idée de démocratie. Le sentiment d’euphorie touche même les éléments les plus avancés et révolutionnaires. Cette phase d’illusions démocratiques et constitutionnelles est inévitable, mais elle ne durera pas. La révolution éveille à la vie politique de nouvelles couches sociales jusqu’alors inertes et « arriérées ». Elles demandent leurs droits. Quand les gens disent : « thawra hatta’l nasr » (révolution jusqu’à la victoire), ce ne sont pas des paroles en l’air.

Toutes les tentatives de restaurer l’équilibre politique seront vaines, parce que le capitalisme en crise ne pourra pas satisfaire les besoins les plus élémentaires de la population. Il y aura une série de régimes bourgeois instables. Les gouvernements tomberont les uns après les autres. Cela présente un danger. Lorsque la lutte des classes est dans une impasse, l’Etat tend à s’élever au-dessus de la société et à acquérir une relative indépendance. Il en résulte un régime militaire instable – c’est-à-dire un régime bonapartiste. L’existence même d’un tel régime suffit à souligner que la révolution commencée le 25 janvier n’est pas terminée. Elle connaîtra de nombreux revirements avant son dénouement final.

Malgré les appels à l’« unité nationale », la société égyptienne est toujours plus polarisée. La révolution a encore d’énormes réserves de soutien dans la population. Les étudiants se mobilisent dans les universités. Les travailleurs font grève, occupent leurs usines et expulsent les patrons haïs et les dirigeants syndicaux corrompus. En seulement trois jours de grève, les travailleurs du pétrole ont obtenu la satisfaction de toutes leurs revendications, y compris la démission du ministre du pétrole. Cela montre où réside le véritable pouvoir.

Le régime militaire en Egypte ne peut pas se maintenir longtemps. Toutes les tentatives de restaurer l’« ordre » ont échoué. L’armée a tenté de mettre un terme aux grèves, mais les grèves continuent. Loin de se replier, le mouvement des travailleurs est ascendant. Que peuvent faire les généraux ? S’ils n’ont pas pu utiliser leurs tanks pour écraser l’insurrection, ils pourront encore moins noyer des grèves dans le sang – alors qu’ils sont censés être à la tête d’un régime démocratique.

Les généraux devront passer le pouvoir à un gouvernement civil (bourgeois). Ce sera la contre-révolution sous un masque démocratique. Mais la contre-révolution ne parviendra pas facilement à restaurer la stabilité. Pour les travailleurs, la démocratie n’est pas un mot creux. Si la démocratie ne mène pas à une amélioration du niveau de vie, à des emplois et des logements, à quoi bon avoir lutté ?

Si tout ceci s’était déroulé il y a dix ans, la classe dirigeante aurait peut-être réussi à consolider une sorte de régime démocratique bourgeois. Le boom économique mondial lui aurait donné une marge de manœuvre. Mais à présent, il y a une crise mondiale du capitalisme. C’est à la fois une cause de la révolution et un facteur qui ne permettra pas d’en finir facilement avec elle. Le système capitaliste n’a rien à offrir aux masses. Même en Europe et aux Etats-Unis, il ne peut pas garantir des emplois et un niveau de vie décent. Comment le pourrait-il en Egypte ?

La mobilisation des travailleurs qui font grève, occupent leurs entreprises et expulsent leurs managers est d’une énorme importance. Cela signifie que la révolution entre dans les entreprises. Les travailleurs égyptiens passent de la lutte pour la démocratie dans le pays à la lutte pour la démocratie sur leur lieu de travail. La classe ouvrière participe à la révolution sous sa propre bannière. Elle lutte pour ses propres revendications. C’est un facteur décisif pour le futur de la révolution.

Les travailleurs protestent contre la corruption et les bas salaires. Ils se révoltent contre les managers appointés par l’Etat et constituent des comités révolutionnaires. C’est exactement ce qu’il faut faire.

Des analystes bourgeois soulignent que beaucoup de ces grèves sont de nature économique. Evidemment ! La classe ouvrière lutte pour ses revendications immédiates. Autrement dit, elle voit dans la révolution un moyen de lutter non seulement pour la démocratie, mais aussi pour de meilleurs salaires, de meilleures conditions de travail – une meilleure vie. Elle lutte pour ses propres revendications de classe. Et cette lutte ne cessera pas sous prétexte que Moubarak n’occupe plus le palais présidentiel.

Pour une démocratie ouvrière !

A Suez, pendant 4 ou 5 cinq jours, l’Etat s’est complètement effondré. Comme en Tunisie, des comités révolutionnaires et des checkpoints armés ont été constitués pour défendre le peuple. Ceci souligne que les soviets (conseils ouvriers) ne sont pas une invention arbitraire des marxistes, mais qu’ils émergent spontanément au cours de la révolution.

Cela pose la question centrale de l’Etat. La révolution a mis à genoux le vieil appareil d’Etat. Il doit être remplacé par un nouveau pouvoir. Il y a un pouvoir, dans la société, qui est plus puissant que tout Etat : le pouvoir du peuple révolutionnaire. Mais il doit être organisé. En Egypte comme en Tunisie, il y a des éléments de double pouvoir (vieil appareil d’Etat/comités révolutionnaires). Des villes et des régions entières sont passées sous le contrôle de ces comités révolutionnaires.

En Tunisie, l’organisation révolutionnaire du peuple est allée encore plus loin qu’en Egypte. Souvent organisée autour des structures locales de l’UGTT, la démocratie révolutionnaire a pris la direction de la société dans un certain nombre de villes et de régions, après avoir expulsé les anciennes autorités liées au RCD. La classe dirigeante parle de « chaos » et d’« insécurité ». Mais en réalité, le peuple organisé garantit l’ordre et la sécurité. Cependant, il s’agit d’un ordre différent – d’un ordre révolutionnaire.

Après l’effondrement des forces de police égyptiennes, le 28 janvier, le peuple a pris l’initiative de protéger les quartiers. Armés de couteaux, de machettes et de battes, ils contrôlaient les voitures. Dans certains endroits, ils organisaient la circulation, etc. Il s’agissait d’embryons de milices ouvrières – une alternative à l’Etat de l’ancien régime.

De même que des comités révolutionnaires ont été constitués pour défendre le peuple contre les éléments criminels, lorsque la police a quitté les rues, il faut à présent les développer et les généraliser pour organiser la révolution. Pour défendre et étendre la révolution, il faut former partout des comités de défense !

Des comités élus pour la défense de la révolution existent déjà dans certains endroits. Il en faut dans toutes les usines, tous les quartiers et tous les villages. Ces comités révolutionnaires devraient être liés au niveau local, régional et national. Ce serait le point de départ d’un futur gouvernement ouvrier et paysan – une alternative réelle au régime dictatorial pourri.

Complète purge et démocratisation de l’armée !
Pour la constitution de comités de soldats.
A bas les généraux corrompus et réactionnaires !
Dissolution immédiate de l’appareil répressif.
Tous les coupables d’actes de terreur contre le peuple doivent être jugés et punis.
Pour l’armement général du peuple.
Pour la constitution d’une milice populaire.
Pour un gouvernement ouvrier et paysan !


La révolution n’a pas de frontières

Le caractère international de la révolution est clair depuis le début. Tous les pays de la région connaissent les mêmes problèmes que l’Egypte et la Tunisie : hausse des prix de la nourriture, régression sociale, chômage de masse et corruption généralisée. Des millions de gens luttent pour survivre. Et dans la société comme dans la nature, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Ce qui se passe en Egypte et en Tunisie peut se produire dans de nombreux pays, et pas seulement dans le monde arabe.

Les impérialistes se consolaient en répétant qu’il n’y a pas « d’effet domino ». Mais les dominos ont commencé à tomber : Libye, Maroc, Soudan, Irak, Djibouti, Yémen, Bahreïn, Oman et Syrie. Tous sont entrés dans le tourbillon révolutionnaire, à des degrés divers. D’autres suivront.

Dans le cas de l’Irak, la révolution est liée à la lutte contre l’impérialisme et l’occupation militaire étrangère, à quoi s’ajoute la lutte pour l’auto-détermination du peuple kurde. En même temps, le mouvement de révolte en Irak a balayé toutes les divisions sectaires entre Shiites et Sunnites, ou encore entre Kurdes, Turkmènes et Arabes – divisions qui renforçaient la domination de politiciens réactionnaires.

L’inflation est l’un des problèmes majeurs qui alimentent le mouvement révolutionnaire. Les gouvernements avaient supprimé ou diminué les subventions pour le pétrole et le sucre. Dans l’espoir de prévenir une explosion sociale, les gouvernements de Jordanie, d’Algérie et de Libye ont tous fait marche arrière, récemment, en réduisant les prix des aliments de base et les taxes sur la nourriture importée.

Même les monarchies pétrolières du Golfe sont inquiètes. Au Koweït, ils ont donné 4600 euros à tous les citoyens. Mais de telles mesures ne peuvent au mieux que reporter le soulèvement révolutionnaire, qui est inévitable.

Les médias occidentaux ont décrit le mouvement au Bahreïn comme une lutte religieuse entre la majorité sunnite et la minorité shiite. C’est un mensonge. Le peuple du Bahreïn se bat contre la corruption, pour des élections libres, contre les discriminations, pour les droits des immigrés et des femmes, contre le chômage et pour un partage plus juste des richesses. Partout, nous voyons le même courage des masses face à la répression. Et encore une fois, la classe ouvrière a joué un rôle décisif. En menaçant le régime d’une grève générale, les syndicats ont poussé le gouvernement du Bahreïn à faire des concessions.

Dans les Etats du Golfe, il y a une exploitation brutale des travailleurs, qui sont majoritairement des immigrés. 1,1 million de Pakistanais travaillent en Arabie Saoudite. C’est la même situation dans tous les pays du Golfe. Des grèves ont eu lieu, ces dernières années, dont les médias n’ont pas parlé. A Dubaï, par exemple, 8000 travailleurs du bâtiment ont fait grève.

L’Arabie Saoudite, ce bastion de la réaction au Moyen-Orient, ressemble à une cocotte minute sans soupape. Dans de tels régimes, lorsque l’explosion se produit, elle est soudaine et d’une extrême violence. La famille royale est corrompue, dégénérée et pourrie jusqu’à la moelle. Elle est divisée sur la question de la succession. La colère et la frustration de la population ne cessent de croître. Il est significatif que même le clergé wahhabite critique le régime. Lorsque la révolution commencera dans ce pays, les immenses réserves pétrolières du royaume ne sauveront pas la monarchie.

La révolution arabe a ravivé le mouvement révolutionnaire en Iran, où des officiers de la « Garde Révolutionnaire » ont déclaré qu’ils n’étaient pas disposés à tirer sur le peuple. Les divisions dans l’appareil d’Etat soulignent la profonde crise du régime.

Dans chacun des cas, il est difficile de dire quel type de régime émergera. Cela dépend de nombreux facteurs et diffèrera selon les pays. Les processus en Egypte et en Tunisie étaient pratiquement identiques. Mais en Libye, la situation était différente dès le début. Le régime bénéficiait d’une base plus solide, en particulier dans la région de Tripoli. L’insurrection s’est essentiellement limitée à l’est du pays et la révolution s’est rapidement transformée en une guerre civile.

Kadhafi est prêt à tout. Il n’a pas hésité à plonger le pays dans un conflit meurtrier. Il y a eu des défections massives, dans l’armée libyenne, y compris au sommet. Mais cela n’a pas eu le même effet qu’en Egypte et en Tunisie, du fait de la nature différente du régime et de l’armée.

Une chose est claire : toutes les cartes sont rebattues, dans la région. A terme, aucun de ces régimes ne survivra. Suivant le rapport de forces entre les classes et toute une série de facteurs internes et externes, différents scénarios sont possibles. Mais ce qui est certain, c’est qu’aucun de ces régimes ne pourra satisfaire les revendications fondamentales des masses.

L’impuissance de l’impérialisme

Les impérialistes sont très inquiets. Ils se demandent jusqu’où ces révolutions peuvent aller et s’étendre. Ils ne les avaient pas anticipées et ne savent pas comment réagir. Si Obama n’a pas publiquement appelé Moubarak à démissionner, c’est parce qu’il redoutait les effets que cela aurait eu sur les autres Etats de la région. Il a dû s’exprimer dans un langage très soigneusement codifié.

Le cynisme des gouvernements occidentaux est flagrant. Après avoir soutenu les dictatures en Egypte et en Tunisie, pendant des décennies, voilà qu’ils sont tous partisans de la « démocratie » et des « droits de l’homme ». Dans leur bouche, ces mots empestent l’hypocrisie. Sarkozy avait publiquement présenté Ben Ali comme un ami de la démocratie et des droits de l’homme à l’époque où ce dernier torturait ses opposants dans les prisons tunisiennes. Et Washington a couvert les actes barbares de toutes les dictatures pro-américaines. Les impérialistes en payent désormais le prix.

La politique affecte l’économie – et réciproquement. Les prix du pétrole ont grimpé, face aux craintes que la révolte se propage aux autres pays arabes, y compris l’Arabie Saoudite. Les « marchés » redoutent aussi que les livraisons d’hydrocarbures via le Canal de Suez soient affectées. Le prix du Brent a un moment dépassé les 120 dollars le baril. Cela menace la faible et fragile reprise de l’économie mondiale.

Pour des raisons économiques, politiques et militaires, les impérialistes ont besoin de stabilité au Moyen-Orient. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire ! Dès le début, les Américains se sont efforcés de trouver une réponse cohérente à des événements qui se développaient à un rythme quotidien. En réalité, la première puissance mondiale était réduite au rang d’observateur impuissant. Un article de The Independent avait pour titre : Les mots forts de Washington soulignent son impuissance. Cela résume bien la situation.

Des gens « avertis » pensent que la révolution arabe fait partie d’une conspiration impérialiste. Rien ne pourrait être plus éloigné de la réalité. Les capitalistes ont été pris par surprise. Ces révolutions ont complètement déstabilisé l’une des plus importantes régions à leurs yeux. Et leurs répercussions dépassent largement le monde arabe.

Le Moyen-Orient est une région clé pour les impérialistes. Les Américains ont passé quatre décennies à y construire leur position. L’Egypte en était un élément clé. Mais tout a été balayé en quelques semaines. Le pays le plus riche et le plus puissant au monde était complètement paralysé. Obama ne pouvait pas intervenir. Et il trouvait même difficile de dire quoi que ce soit sans offenser ses alliés saoudiens.

Environ 8 % du commerce mondial passe par le canal de Suez, et les Américains étaient terrifiés à l’idée qu’il pourrait être fermé. Mais ils ne pouvaient rien faire. Tout ce que pouvait dire Obama, c’est qu’on devait laisser les Egyptiens choisir. Ce n’est pas ce que disaient les Américains au sujet de l’Irak et de l’Afghanistan : ils n’ont pas réfléchi à deux fois avant d’envahir ces pays.

Dans les jours qui ont précédé la chute de Moubarak, des navires de guerre américains ont été stationnés près du canal de Suez. L’objectif était de rappeler la main de fer que couvre le gant de velours. Mais ce n’est pas allé plus loin. Les Etats-Unis se sont brûlés les doigts en Irak. Une nouvelle aventure militaire en Egypte aurait provoqué une tempête de protestations aux Etats-Unis et dans le monde entier. Pas une seule ambassade américaine ne serait restée debout, dans tout le Moyen-Orient. Tous les régimes arabes pro-américains auraient été menacés par la colère des masses.

Du fait de sa proximité géographique avec l’Arabie Saoudite et l’Iran, le Bahreïn est d’une grande importance stratégique pour les Etats-Unis. Ils y ont leur Cinquième Flotte et leur plus importante base navale de toute la région. Et pourtant, les Américains n’ont pas pu intervenir contre le mouvement révolutionnaire au Bahreïn. Si tout cela faisait partie d’un plan secret des impérialistes, personne n’en a prévenu Obama !

Dans le cas de la Libye, ils n’ont pas hésité à dénoncer Kadhafi et à appeler à son renversement – à la différence de leur attitude à l’égard de Moubarak. C’est un exemple de plus de leur duplicité et de leur cynisme. Et à présent, on a une agression impérialiste ouverte en Libye. Cela n’a rien à voir avec la protection du peuple libyen, sans parler de défendre la révolution. C’est tout le contraire. Leur objectif est de renforcer leur position dans la région pour étrangler les révolutions qui ont commencé.

Nous nous opposons à cette guerre impérialiste. La tâche de renverser Kadhafi appartient au peuple libyen. La vérité, c’est que l’impulsion révolutionnaire initiale a été détournée par les éléments contre-révolutionnaires du Conseil National de Transition, qui ont placé le sort du peuple libyen entre les mains des impérialistes.

Non à l’intervention étrangère !
Non à l’occupation de l’Irak et de l’Afghanistan !
Non au bombardement de la Libye !
A bas l’impérialisme !


Israël et les Palestiniens

C’est en Israël que la révolution arabe a provoqué la plus grande panique. La première force militaire de la région était tétanisée par ce qui se passait en Egypte. La clique dirigeante israélienne a dû faire très attention à ce qu’elle en disait. Benyamin Netanyahu a ordonné à ses ministres de ne pas en parler publiquement. Il a demandé aux Etats-Unis et à plusieurs pays européens d’atténuer leurs critiques à l’égard de Moubarak. Il a désespérément tenté de convaincre les alliés d’Israël qu’il était dans leur intérêt de soutenir Moubarak, de façon à garantir la stabilité du régime égyptien. Mais les Etats-Unis et l’Union Européenne craignaient qu’en s’accrochant au pouvoir, Moubarak radicalise toute la situation. D’où la formule d’une « transition ordonnée » – c’est-à-dire non révolutionnaire.

Marx soulignait qu’aucun peuple ne peut être libre tant qu’il maintient un autre peuple en servitude. Israël écrase une population palestinienne qui apprend, sur les écrans de télévision, comment on renverse des tyrans. En Cisjordanie, les Palestiniens sont soumis avec l’aide de la police de l’Autorité Palestinienne. Cependant, il n’est pas certain que la police palestinienne ou les forces de sécurité israéliennes soient en mesure d’écraser un mouvement de masse des Palestiniens.

La paix séparée signée par Israël et l’Egypte, en 1979, était une trahison de la cause palestinienne. Elle est très impopulaire dans le monde arabe. L’attitude du régime égyptien était un élément important dans la poursuite de l’occupation israélienne des territoires palestiniens conquis en 1967.

Les accords d’Oslo de 1993 étaient une nouvelle trahison. Les soi-disant territoires palestiniens ne sont qu’une nouvelle version des Bantoustans sud-africains. Aucune des revendications fondamentales des Palestiniens n’a été satisfaite. Les dirigeants Israéliens ont continué d’imposer leur loi. Et depuis les choses sont allées de mal en pis.

A présent, la chute de Moubarak, le plus puissant allié régional d’Israël, a bouleversé toute l’équation. Le gouvernement israélien a été ébranlé. La perspective d’une occupation indéfinie des territoires palestiniens est remise en cause. Du jour au lendemain, les plans soigneusement préparés par les impérialistes sont en ruines.

Des décennies de soi-disant « lutte armée » et de négociations n’ont mené nulle part. Mais le mouvement révolutionnaire en cours pose la question palestinienne sous un jour très différent. La clique dirigeante israélienne ne craint pas les roquettes du Hamas et les attentats suicide. Au contraire : chaque roquette qui tombe sur un village israélien renforce le soutien de l’opinion publique au gouvernement de Netanyahu. Mais une Intifada palestinienne, combinée à un mouvement révolutionnaire en Egypte et en Jordanie, serait une toute autre affaire.

Comme puissance militaire, Israël est peut-être invincible. Dans l’hypothèse d’une nouvelle guerre avec l’Egypte, Israël l’emporterait probablement. Mais pourrait-il vaincre un mouvement de masse en Cisjordanie, à Gaza et en Israël même ? Cette question doit troubler le sommeil des généraux et politiciens israéliens.

La chute de Moubarak a des implications très sérieuses pour Israël. Dans le meilleur des cas, ils devront encore augmenter les dépenses militaires, face aux risques de guerre au sud. Or, l’économie israélienne est déjà en crise. De nouvelles coupes budgétaires et contre-réformes provoqueront une intensification de la lutte des classes en Israël même.

Netannyahou imaginait que son pays était un îlot de stabilité et de démocratie qui ne pourrait pas être affecté par la révolution. Mais au fond, Israël n’est qu’un pays du Moyen-Orient menacé, lui aussi, par la vague révolutionnaire partie d’Egypte et de Tunisie. Il y a de nouvelles contradictions en Israël. L’augmentation des prix du pétrole et de l’eau fait d’Israël l’un des pays où le coût de la vie est le plus élevé au monde. La direction des syndicats israéliens (Histadrut) a évoqué la possibilité d’une grève générale.

Les événements en Egypte et en Tunisie auront de profondes conséquences pour les Palestiniens. Ces derniers ont été trahis par tous ceux en qui ils avaient fait confiance, à commencer par les régimes arabes prétendument « amis », et sans oublier leurs propres dirigeants. Wikileaks a récemment révélé la scandaleuse collusion entre Abbas et les dirigeants israéliens et américains. Cela aura un grand impact sur la psychologie des masses palestiniennes.

Pendant 40 ans, la direction de l’OLP a trahi la cause des Palestiniens. En Jordanie, les dirigeants de l’OLP auraient pu prendre le pouvoir en 1970. Toute l’histoire de la région aurait été différente. Mais la direction nationaliste et petite-bourgeoise de l’OPL refusa d’attaquer ses « frères arabes ». Le roi de Jordanie a alors mobilisé les Bédouins qui, avec l’aide de l’armée pakistanaise, ont massacré des milliers de Palestiniens. C’est un fait que davantage de Palestiniens ont été tués par leurs « frères arabes » que par l’armée israélienne.

Les mêmes Bédouins qui avaient été mobilisés contre les Palestiniens, en 1970, manifestent à présent contre le roi de Jordanie. D’anciens officiers préviennent que s’il ne fait pas de concessions, le roi connaîtra le même sort que Moubarak et Ben Ali. La monarchie hachémite ne tient que par un fil. Parti des régions bédouines, le mouvement a gagné Amman et les Palestiniens, qui constituent la majorité de la population de Jordanie.

Il est temps de réexaminer la tactique et la stratégie de la lutte des Palestiniens. Les révélations de Wikileaks confirment que les dirigeants palestiniens jouent le rôle d’agents des Israéliens. Les Palestiniens sont amers et en colère. Toutes les tentatives de mobilisations à la fois contre Abbas et le Hamas ont été brutalement réprimées. Même les manifestations en solidarité avec les révolutions égyptienne et tunisienne ont été interdites et réprimées – aussi bien par le Hamas que par l’Autorité Palestinienne.

Des milliers de jeunes palestiniens tentent de s’unir contre la direction actuelle du mouvement, contre l’occupation israélienne et pour l’unité de la lutte des Palestiniens. Depuis des décennies, les Palestiniens rêvaient d’une Intifada en Egypte. C’est désormais une réalité. Le renversement de régimes arabes réactionnaires porte un coup sérieux aux impérialismes israéliens et américains. Cela transforme toute la situation. Les Palestiniens peuvent voir qui sont leurs véritables alliés : les travailleurs et les paysans de tout le monde arabe.

C’est un tournant majeur. Les Palestiniens voient comment il faut lutter contre l’oppression : non pas avec des bombes et des roquettes, mais par une mobilisation révolutionnaire de masse. Il va y avoir de nouveaux mouvements contre les chefs du Hamas et du Fatah à Gaza et en Cisjordanie. La jeunesse fera pression. L’idée d’une nouvelle Intifada gagnera rapidement du terrain. Cela changerait tout.

Pour une fédération socialiste !

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les impérialistes ont créé des Etats-nations arabes artificiels. Ces divisions ne répondaient pas à des critères naturels ou historiques, mais uniquement aux intérêts de l’impérialisme. Les accords de Sykes-Picot ont partagé l’Irak, le Liban, la Syrie et la Jordanie entre la France et la Grande-Bretagne. Par la Déclaration de Balfour, en 1917, les Britanniques ont ouvert la voie à l’établissement d’un Etat juif en Palestine.

Dans le Golfe, l’impérialisme a constitué des petits Etats dans le but de les contrôler facilement et de garantir ainsi son accès aux énormes réserves de pétrole de la région. La monarchie saoudienne consistait en bandits du désert placés au pouvoir par l’agent britannique Wilson Cox. L’impérialisme a démembré le corps vivant de la grande nation arabe.

La révolution arabe ne l’emportera que si elle met un terme à la scandaleuse balkanisation du monde arabe. Le seul moyen de briser les chaînes forgées par l’impérialisme est d’inscrire sur notre bannière le mot d’ordre de Fédération Socialiste du monde arabe. Cela créerait une gigantesque entité économique s’étalant de l’Océan atlantique jusqu’à l’Euphrate.

Sur la base d’une économie nationalisée et planifiée, le chômage serait immédiatement éliminé. Le vaste réservoir de main d’œuvre inutilisée serait mobilisé pour résoudre les problèmes de logement, de santé, d’éducation et d’infrastructures. L’unification des énormes ressources de ces pays, sur la base d’un plan de production commun, mettrait à l’ordre du jour une nouvelle révolution culturelle, qui ferait de l’ombre à toutes les conquêtes passées.

Une Fédération Socialiste, avec complète autonomie des peuples, est la seule façon de résoudre les conflits nationaux et religieux qui ont empoisonné la vie des peuples pendant des décennies, menant à une guerre après l’autre. Les Musulmans et les Coptes, les Sunnites et les Shiites, les Palestiniens et les Juifs, les Arabes, Amazighs, Maronites, Kurdes, Turkmènes, Arméniens, Druzes – tous trouveraient leur place dans une Fédération reposant sur le principe d’égalité absolue.

Défendre le droit à l’auto-détermination du peuple palestinien et de toutes les nationalités opprimées !
A bas les agresseurs impérialistes et israéliens ! Non à l’occupation de l’Irak, de l’Afghanistan et de la Palestine !
Les collaborateurs, dehors ! Pour le renversement révolutionnaire de tous les régimes arabes complices de l’impérialisme !
Exproprier les biens des impérialistes et de leurs agents arabes ! Les richesses des Arabes doivent revenir au peuple arabe !
Pour l’unité révolutionnaire des peuples ! Pour une Fédération Socialiste du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, sur la base d’une union libre, égale et fraternelle, avec autonomie complète pour toutes les nationalités !


Bond en avant de la conscience

La révolution égyptienne est la réponse définitive à tous les sceptiques et snobs intellectuels qui se plaignent constamment du prétendu « faible niveau de conscience » des masses. Quant aux « experts » occidentaux qui parlaient avec mépris de la « passivité » et « l’apolitisme » des travailleurs égyptiens, ils peuvent ravaler leurs analyses.

Les marxistes comprennent qu’en général la conscience n’est pas progressiste ou révolutionnaire, mais profondément conservatrice. La résistance au changement est profondément enracinée dans l’esprit humain, et se rattache aux mécanismes de survie qui remontent aux origines de notre espèce. Ainsi, en règle générale, la conscience humaine est à la traîne des événements. Elle ne change pas de façon graduelle (aujourd’hui plus révolutionnaire qu’hier, demain plus qu’aujourd’hui, etc.), de même que l’eau qu’on refroidit de 100° à 0° ne passe pas par l’état de pâte, puis de gelée, avant de devenir solide.

Notre conception de la conscience humaine est matérialiste et dialectique – et non métaphysique et mécaniste. La dialectique nous apprend que les choses se transforment en leur contraire, et que de petits changements, apparemment insignifiants, peuvent à un certain stade – connu en physique sous le nom de « point critique » – produire des transformations explosives de très grande échelle. Les changements de la conscience interviennent soudainement, lorsque de grands événements la forcent à changer. Quand cela se produit, la conscience rattrape brusquement la réalité. Ce bon en avant de la conscience est précisément ce qui caractérise une révolution.

Que ce soit en Egypte, en Iran, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, les masses n’apprennent pas dans les livres, mais à travers leur propre expérience. Lors d’une révolution, elles apprennent beaucoup plus vite qu’habituellement. Les travailleurs et les jeunes d’Egypte ont davantage appris en quelques jours de lutte qu’en 30 ans de vie « normale ». Dans les rues, les masses acquièrent un sens de leur propre pouvoir. Elles se débarrassent de la peur paralysante de la police anti-émeute appuyée par des canons à eau et des milliers de bandits en civil – et elles les repoussent et les battent.

Dans une révolution, les masses apprennent très rapidement. On le voit bien en Egypte et en Tunisie. Ce sont de vastes laboratoires où toute une série de revendications sont en compétition et mises à l’épreuve. Dans la rue, les masses décident quels slogans sont appropriés ou non. Le même processus se répètera encore et encore – et non seulement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, mais partout.

Du Caire à Madison

En 1917, il a fallu environ une semaine pour que le peuple indien apprenne qu’une révolution avait éclaté en Russie. Aujourd’hui, tout le monde peut suivre les révolutions en direct sur des écrans de télévision. La situation au Moyen-Orient a d’énormes répercussions à travers le monde. En Inde, pour la première fois en 32 ans, les syndicats et partis de gauche ont organisé une grève générale pour de meilleurs salaires et contre l’inflation. 200 000 personnes ont manifesté à New Delhi. L’économie indienne se développe au rythme annuel de 9 %, mais cela renforce surtout les inégalités en concentrant les richesses au sommet de la société.

En Tunisie et en Egypte, le système capitaliste commence à se briser à son maillon le plus faible. Les « experts » bourgeois nous diront que cela ne peut pas se produire dans les pays capitalistes développés, que la situation y est différente, et ainsi de suite. Oui, la situation y est différente, mais seulement en degrés. Partout, la classe ouvrière et la jeunesse font face à la même alternative : soit ils acceptent la destruction systématique de leurs droits et conditions de vie – soit ils luttent.

L’argument selon lequel « cela ne peut pas se passer ici » n’a aucune base scientifique ou rationnelle. On entendait la même chose au sujet de la Tunisie il y a quelques mois à peine, lorsque ce pays était considéré comme le plus stable d’Afrique du Nord. Et ils ont même répété cette idée à propos de l’Egypte, juste après la chute de Ben Ali. Quelques semaines plus tard, Moubarak était renversé. Telle est la vitesse à laquelle se succèdent les événements, à notre époque. Tôt ou tard, la même question se posera dans tous les pays d’Europe, au Japon, au Canada – et aux Etats-Unis mêmes.

Les prix augmentent, et notamment ceux de la nourriture. Cela aura des conséquences très graves, en particulier dans les pays pauvres. D’après la Banque Mondiale, 44 millions de personnes seront jetées dans l’extrême pauvreté au cours de la période à venir. On passera alors la barre du milliard de personnes officiellement « très pauvres ». Des millions de personnes se battent pour se nourrir, se loger, avoir un emploi – autrement dit, pour accéder aux conditions fondamentales d’une existence semi-civilisée. En ce début de XXIe siècle, tout le monde devrait y avoir droit. Mais même en Europe et en Amérique du Nord, le système capitaliste pourrissant n’est plus capable de garantir ces droits.

Nous ne traversons pas une crise cyclique normale du capitalisme. La reprise elle-même n’est pas normale. Les capitalistes renforcent au maximum l’exploitation des travailleurs dans l’espoir de restaurer l’équilibre économique, de payer leurs dettes, de réduire le coût du travail, etc. Mais ce faisant, ils déstabilisent toute la situation. Cela explique en partie aussi bien la révolution arabe que le regain de la lutte des classes en Europe.

Tous les pays du monde ont été affectés. Ce n’est pas par hasard que le régime chinois s’est rallié au chœur qui réclamait l’« ordre » en Egypte. C’est en partie une question d’intérêt économique. La Chine a besoin de stabilité économique, à l’échelle mondiale, pour continuer d’exporter massivement. Mais surtout, Pékin redoute tout ce qui pourrait stimuler des grèves et des manifestations en Chine même. Le régime a banni toute référence à l’Egypte, sur Internet.

A l’inverse, tous les travailleurs conscients du monde se réjouiront du magnifique mouvement des travailleurs d’Egypte et de Tunisie. On ne doit pas en sous-estimer les effets psychologiques. Pour beaucoup, en particulier dans les pays capitalistes développés, l’idée de révolution pouvait sembler abstraite et lointaine. A présent, les événements qu’ils ont suivis en direct, sur leurs écrans de télévision, montrent qu’une révolution est non seulement possible, mais nécessaire.

En Europe et aux Etats-Unis, il y a une haine croissante à l’égard des banquiers et des hommes d’affaires qui se récompensent à coup d’énormes « bonus » pendant que le reste de la société subit contre-réforme sur contre-réforme. Cela s’est reflété dans les grands événements qui ont secoué l’Etat du Wisconsin, aux Etats-Unis. Les travailleurs de la ville de Madison chantaient : « lutter comme un Egyptien ! » C’est une conséquence des politiques de coupes drastiques imposées aux travailleurs américains, en pleine reprise économique.

Du jour au lendemain, le monde a appris que l’Etat du Wisconsin était le théâtre d’une explosion de la lutte des classes, avec 100 000 personnes dans les rues de Madison. Les manifestants brandissaient des pancartes contre le gouverneur Hosni Walker et criaient : « Le dictateur du Wisconsin doit partir ». Des travailleurs égyptiens ont même envoyé des messages de solidarité aux travailleurs du Wisconsin. Le Capitole de Madison a été occupé, et les policiers envoyés pour les évacuer ont rallié le peuple en brandissant des mots d’ordres tels que : « Policiers pour la classe ouvrière ». C’est un développement extrêmement important.

En Europe, nous avons assisté à de grands mouvements de la classe ouvrière et de la jeunesse : huit grèves générales en Grèce en l’espace d’un an ; le grand mouvement contre la casse des retraites en France ; le mouvement des étudiants britanniques ; une grève générale en Espagne ; le mouvement des travailleurs de la métallurgie en Italie. Récemment, au Portugal, il y a eu la plus grande grève générale depuis la chute de la dictature (1974). En Europe de l’Est également, il y a eu d’importants mouvements en Albanie et en Roumanie. En Bulgarie, même la police a fait grève.

Il y a 20 ans, la chute du « communisme » rendait la classe capitaliste euphorique. Mais c’était prématuré. Avec le recul, la chute du stalinisme sera comprise comme le prélude d’un développement encore plus titanesque : le renversement révolutionnaire du capitalisme. Partout, y compris aux Etats-Unis, le système est en crise. Partout, la classe dirigeante s’efforce de placer tout le poids de la crise de son système sur les épaules des couches les plus pauvres de la société.

Ce qui commence dans le monde arabe a des similitudes frappantes avec ce qui a mené au renversement des régimes staliniens d’Europe de l’Est. Sur le papier, ces gouvernements disposaient d’un puissant appareil d’Etat : armée, police, police secrète, etc. Mais cela ne les a pas sauvés. Et lorsque les travailleurs se mobiliseront pour changer la société, tout l’argent et toutes les forces répressives à la disposition des dirigeants d’Europe et des Etats-Unis ne les sauveront pas.

Les masses ont montré leur détermination à lutter. Pour être victorieuses, elles ont besoin d’un programme clair et d’une direction révolutionnaire. Les idées du marxisme sont les seules qui puissent les fournir. L’avenir est à nous.

Vive la révolution arabe !
Travailleurs de tous les pays, unissez-vous !
Vive le socialisme, seul espoir pour l’avenir de l’humanité !
Thawra hatta’l nasr !

Le 14 mars 2011

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